Les couleurs, dans toutes leurs nuances, façonnent notre vision et notre perception de la réalité.
Les couleurs, dans toutes leurs nuances, façonnent notre vision et notre perception de la réalité.
Notre capacité à les discerner est essentielle pour comprendre parfaitement l’environnement qui nous entoure. C’est grâce à elles que les artistes créent de véritables chefs-d’œuvre. En plus de nous guider à travers le monde et de nous procurer du plaisir et de l’émerveillement face à des stimuli visuels, les couleurs exercent une influence extraordinaire sur notre état d’esprit.
Le processus selon lequel nous percevons les couleurs n’est pas encore tout à fait défini. Ce que l’on sait, c’est que notre perception des couleurs dépend de la lumière réfléchie par un objet. Contrairement à ce que nous pouvons penser, les objets ne sont pas colorés par nature. La couleur d’un objet varie selon la longueur d’onde de la lumière qui s’y reflète.
Lorsque la lumière parvient à nos yeux, les photorécepteurs transmettent un signal électrique au cerveau. Ce dernier traite ensuite ce signal et l’interprète en couleur. L’intensité d’une couleur est déterminée par la quantité de lumière. Le cerveau tient compte des conditions d’éclairage pour nous offrir toujours le même rendu, quelle que soit la luminosité de l’environnement.
Le cerveau interprète les longueurs d’onde de la lumière de différentes façons. Par exemple, le rouge correspond à une certaine longueur d’onde et le vert à une autre. Lorsque les longueurs d’onde du rouge et du vert sont transmises simultanément au cerveau, nous percevons la couleur jaune. L’intensité de la lumière influe sur l’éclat des couleurs que nous percevons. Lorsque la luminosité est faible, les objets verts et bleus peuvent paraître plus vifs que les objets rouges. Quand un objet absorbe la lumière, nous le voyons noir.
Notre cerveau ne se contente pas d’interpréter les couleurs : il y associe des réactions émotionnelles. Certaines de ces réactions s’assimilent, comme le fait d’associer le rouge au danger ou à la chaleur, car il s’agit de la couleur du sang et du feu. De même, le blanc et le bleu sont souvent perçus comme des couleurs froides.
Les couleurs ont également une portée symbolique. Lorsqu’une personne est en colère, elle « voit rouge ». Lorsqu’une autre est envieuse, elle est « verte de jalousie ». Certaines
couleurs ont un effet apaisant, comme le bleu et le vert. D’autres encore nous évoquent l’anxiété ou la peur, comme le rouge et le noir.
Les normes culturelles jouent également un rôle dans notre manière de réagir aux couleurs. En Occident, le noir symbolise le deuil, alors que dans de nombreuses autres cultures, il s’agit de l’or, du blanc ou du violet.
Les premières couleurs sont apparues sur les œuvres d’art il y a 40 000 ans. Les humains mélangeaient alors de la terre, du charbon, de la craie et de la graisse animale pour créer des pigments. Depuis, l’apparition de nouveaux pigments a donné lieu à une série de révolutions dans le monde de l’art, ayant marqué la majorité des grands mouvements artistiques de la Renaissance à aujourd’hui.
Le rouge est sans doute la couleur la plus ancienne créée par l’être humain, utilisée dans les peintures rupestres durant la préhistoire. Au cours des XVIe et XVIIe siècles, le pigment rouge est obtenu à partir d’une cochenille rare que l’on ne trouve qu’au Mexique. Son origine en fait l’une des ressources les plus précieuses au monde. À l’instar de Rembrandt, les grands maîtres apposaient sur leurs peintures ce pigment rouge cochenille sur de l’ocre rouge brute pour obtenir une intensité plus riche et profonde.
Le bleu est souvent associé à la religion, car il provient du lapis-lazuli, une pierre précieuse qui, pendant plusieurs siècles, ne se trouvait qu’en Afghanistan. Cet ingrédient très coûteux a été largement utilisé pour créer le pigment bleu outremer jusqu’au XIXe siècle. Parmi les bleus les plus connus, Yves Klein et un fabricant de peinture parisien ont créé un bleu synthétique dans les années 1950.
Certains pigments étaient d’ailleurs extrêmement dangereux pour les artistes. Comme en témoigne le vert de Scheel, une nuance devenue populaire à l’époque victorienne, bien qu’elle contienne des concentrations mortelles d’arsenic. Le vert de Scheel a finalement été remplacé par le vert de Paris, utilisé par Cézanne, Monet et Renoir. N’en restant pas moins toxique, le vert de Paris serait à l’origine de la cécité de Monet. Son utilisation a été interdite dans les années 1960.
Le milieu artistique s’est toujours montré très réactif face aux nouveaux pigments, même si toutes les couleurs n’étaient pas appréciées. Le jaune n’a jamais eu son heure de gloire, sauf auprès de grands artistes comme Van Gogh et William Turner, ce qui leur a valu de nombreuses critiques. Le violet de manganèse, lui, a tellement conquis les impressionnistes, que Monet a été accusé de « violettomania ».
Les nouveaux pigments sont toujours sujets à controverses. Ainsi, l’artiste Anish Kapoor a été très critiqué pour avoir déposé les droits d’utilisation exclusive du Vantablack, le pigment le plus noir jamais obtenu. En riposte à ce monopole, Stuart Semple a créé une teinte appelée Pinkest Pink, que n’importe qui peut acquérir, sauf Anish Kapoor.
C’est grâce à une parfaite maîtrise de l’influence des couleurs sur la psychologie humaine que les artistes peuvent créer des œuvres poignantes. Au fur et à mesure que de nouveaux pigments verront le jour, les artistes parviendront toujours à user du pouvoir des couleurs sur nos émotions.